Travailler aux USA #3
Exercer son métier dans la Grande Pomme
Après une prise de tête mémorable pour me constituer un bon dossier et des expériences d’entretiens originales, j’ai finalement trouvé un travail.
Lancée d’un coup dans la grande marmite du travail aux US, les surprises et autres sources d’étonnement se succèdent, et ce malgré 13 ans passés dans le monde du travail, dont 1 déjà dans une langue qui n’était pas la mienne. Morceaux choisis:
Aux USA, la première journée de travail, appelée orientation, consiste en une réunion avec les nouveaux embauchés afin de te présenter l’entreprise, de te driller sur les détails techniques et de remplir les 17’000 formulaires nécessaires à finaliser ton embauche.
Lors de cette palpitante réunion, j’ai notamment appris:
- que la dénonciation d’un collègue voleur pouvait me rapporter $500.
- que mes retards et absences non justifiés (maladies y compris) sont comptabilisés et qu’un certain nombre m’expose à un avertissement, puis au licenciement.
- que je n’ai toujours rien compris à la hiérarchie et aux titres des employés dans l’entreprise dans laquelle je vais dorénavant travailler (EDIT: après quelques mois ça va mieux, merci!)
- qu’il ne faut pas monter sur une échelle non stable ni enfiler un tournevis dans la prise électrique!
- que voler, c’est mal.
- que si un client venait à trébucher et à choir sur le sol du magasin, je devais lui porter secours mais en prenant bien soin de ne pas m’excuser, car toute manifestation orale d’excuse reviendrait à avouer ma culpabilité dans sa chute, de facto celle du magasin et que cela pourrait nous porter préjudice si il décidait de poursuivre la marque en justice (alors que de toute évidence, cet abruti de client s’est cassé la binette tout seul!)
- Que l’entreprise doit fournir ses horaires aux employés avec deux semaines d’avance (la bonne blague, voir plus bas)
- Que tu peux avoir deux employeurs (voire plus), sans aucun problème.
- Que tu peux avoir 0 ambition, sans aucun problème.
- Que tu peux envoyer une photo de ta tenue par SMS à ton manager le matin, si tu n’es pas sûr qu’elle sera conforme au code vestimentaire de l’entreprise.
Et puis, plus généralement :
- les impôts sont prélevés à la source et malgré que j’aie toujours râlé, en Suisse, pour qu’on obtienne cette possibilité, la somme finale me fait un peu mal
au culau ventre (En Suisse, une somme est prélevée pour diverses assurances mais impôts et caisse maladie sont à payer toi même, mensuellement ou annuellement. La petite facture à 4 chiffres des impôts qui va bien, généralement 15 jours avant Noël.) - de la nourriture est (presque) toujours disponible sur ton lieu de travail. Bonbons, chocolats, pizzas, chips, cupcakes ou donuts, je ne suis pas déçue de travailler débout
ça fait tout ça de gras en moins sur les fesses. - Le salaire est versé toutes les deux semaines.
- Ce même salaire, que j’ai choisi de recevoir directement sur mon compte, aurait tout aussi bien pu m’être payé par chèque (si j’avais su comment en encaisser un!)
- Les semaines commencent un dimanche (ou comment te tromper d’horaire, les premières fois, car la première case de ton planning n’était pas un lundi!)
- Tu communiques avec tes managers par SMS.
- Parfois même d’un étage à un autre du magasin!
- Le délai de résiliation du contrat et de deux semaines. Mais tu peux aussi partir toute suite, si tu décides un beau matin que ton job ne te plait plus.
Et puis, aussi, que le respect du travailleur n’est pas du tout le même qu’en Suisse:
- Tu peux travailler de jour, comme de nuit (et quand je dis nuit, je parle de shifts de 19 ou 20h à 5 ou 6h du matin). (Ou comment te faire regretter la petite “nocturne” (=21 heures) de Globus que tu haïssais tant!)
- Tu peux travailler la semaine, comme le week-end sans être mieux payé (dimanche compris, of course).
- Tu peux aussi travailler le dimanche, de nuit.
- Tu peux finir à 22h un soir et recommencer à 8h le lendemain.
- Tu peux travailler 6 jours de suite, pour des shifts de 4 heures.
- Le salaire minimum est de $8.75. (Et dans le retail, le salaire moyen ne doit pas voler beaucoup plus haut!…)
- Le salaire est le même quel que soit le jour (week-end, jour férié) ou l’heure (jour ou nuit).
- En général, tu reçois tes horaires au mieux le jeudi pour le dimanche. Ou pas. (aujourd’hui, par exemple, nous sommes jeudi, il est midi, et je ne sais toujours pas si je vais travailler demain!)
Au-delà de ça, travailler aux USA c’est aussi expérimenter une dynamique de travail différente et bien plus positive, il faut le dire, et s’enrichir de bonnes expériences. (Et parfois, on devrait en prendre de la graine!):
- Quand tu fais quelque chose de bien, on te le dit (ce qui change de la Suisse où ne sait que te taper sur les doigts!)
- Dans la même veine, ton bon travail est reconnu, et si tu connais ton domaine, on n’attend pas 6 mois pour te faire confiance.
- Les possibilités de croissance dans l’entreprise sont réelles, et tu n’as pas besoin d’avoir 3 ans d’ancienneté pour décrocher un meilleur poste.
- Ils sont (relativement) flexibles sur les disponibilités et horaires, ce qui fait que tu peux facilement aménager une grille de travail pas trop dégueulasse.
- Les gens ont été adorables et accueillants avec la petite suissesse expatriée que je suis, ils t’aident volontiers que ce soit dans le cadre du travail ou en dehors.
- Une partie de ton temps de travail est disponible pour essayer les vêtements du magasin, et faire ton défilé dans la nouvelle collection.
- L’ambiance est décontractée, la collaboration plus naturelle et personne ne compte les “points” quand il s’agit de filer un coup de main à son collègue.
- Tu peux passer ta journée à débattre sur la future gagnante du Bachelor avec tes managers. (#teamLaurenB!)
- Le matin en arrivant, tu hug tes collègues.
- Si tu as une dure journée, tu hug tes collègues.
En résumé, habituée aux horaires et aux salaires suisses (!) ainsi qu’à une dynamique d’entreprise différente (et dans l’ensemble plus négative, il faut bien le dire!), le choc fut conséquent. Du très bon, du moins bon, une chose est sûre: je n’ai pas fini d’être surprise… Et toi non plus!
Allez, salut!
Eh bien, il faut une fameuse dose de courage pour affronter tout ça et se lancer dans une telle aventure! Il faut impérativement être jeune. A mon âge, c’est râpé;)
Note que j’ai aussi habité un pays étranger où il a fallu s’acclimater à tout.
C’est certain que tout cela doit être assez surprenant et qu”il te faudra un peu de temps pour assimiler leur façon de fonctionner.
Tous mes voeux de réussite dans ton nouveau job;)
Merci beaucoup Brigitte! Je commence à être pas trop mal acclimatée, mais je me demande si je serai un jour vraiment habituée, dans le sens où ce genre de différence ne me surprendra même plus, passé un certain stade! L’avenir nous le dira! Merci de ton passage et à bientôt!
Amy
Merci pour cet article très complet ! J’envisage également de m’expatrier aux US sous peu… Du coup j’aurais quelques questions à te poser ->
Dans quel secteur d’activité travailles tu ? Et quel visa as tu obtenu ?
Merci d’avance et encore merci pour tes précieux conseils 🙂
Coucou Rouge Cannelle! Je vais te faire un mail directement, ce sera plus simple! 😉
Haha merveilleux ma pauvre Amy ! C’est très marrant à lire et très intéressant surtout. C’est difficile de s’adapter mais je trouve qu’on y gagne une grande ouverture d’esprit, tu ne trouves pas ?
A un mois de mon retour en Suisse, je crois que je ne suis plus prête avant longtemps d’aller vivre ailleurs haha. Je me réjouis enfin de retrouver la paix ! Mais j’ai adoré vivre ailleurs et voir autre chose.
A très vite ! ♡
Coucou Melody!! Effectivement, ce genre d’ouverture, outre jouer (un peu) avec les nerfs, ouvre l’esprit! D’ailleurs, je ne me plains pas (trop) de mon sort, mais je trouve intéressant de relever les différences culturelles dans les deux pays! Je ne savais que tu rentrais, comment ça se fait? Tu te réjouis ?
Oui j’adore voir les différences !
Alors je rentre car après 5 ans à Paris, j’ai envie de retrouver mon confort en Suisse et aussi mes amis 🙂 Oui je me réjouis même si je suis triste de quitter cette ville car je l’adore. Retour à Lausanne donc 🙂
Eh bien quelle aventure de travailler aux US ! Pour ma part, je ne fais qu’y passer quelques jours pour le boulot, je reste rattachée à la France. Peut-être pas plus mal finalement…
Il y a du positif et du négatif, mais il est vrai que les “conditions” ne sont finalement pas si mauvaises en Europe! 😉
et en France c’est l’apocalypse si on essaye de toucher au code du travail!!!!! y’en a qui devrais aller bosser un peu a l’étranger pour apprendre à relativiser
Ton commentaire m’a fait bien rire Gaëlle, car c’est exactement ce que je me dis tous les jours 😉 Et spécialement avec cette actualité de révise du code du travail en France (qui, soit dit en passant me semble complètement abracadabrante!) Bises,
Amy
Merci Amy de partager ton expérience – et c’est si bien écrit, comme toujours.
Une belle façon d’apprendre à relativiser et laisser de côté ses A prioris ! Bonne semaine de travail alors 😉
Merci Daphné, ça me touche beaucoup! Bises et merci pour tes encouragements 😉
Amy
Ton post est surprenant et très bien raconté ! J’ai bien aimé savoir que si je tombe dans une magasin en USA, personne va venir s’excuse de quoi ce soit. J’apprit aussi que je ne pouvait pas mettre un tournevis sur une prise électrique pourtant c’est mon activité favorite !
Blagues a part, félicitations pour ton nouveau travail et je reste avec le positive que finalement c’est plus important. Le fait qu’ils croient dans la personne et son travail c’est déjà génial ! Bon semaine 🙂
AHAHHA je me suis dit exactement la même chose à propos du tournevis!! (D’ailleurs, un autre fait intéressant sur les américains…. ils ne comprennent pas le second degré: quand le mec a parlé du tournevis j’ai dit “oh ben mince alors, moi qui adore mettre des objets métalliques dans les prises électriques”… tout le monde m’a regardé très bizarrement, sans comprendre la blague!) Bises et belle journée Eva!
Amy
Merci beaucoup. J’ai appris beaucoup aujourd’hui sur les conditions du travail aux USA
A bientôt
Merci de ton message Nadji 😉
Ahaha génial, c’est vraiment super tes retours Amy, du bon comme du moins bon mais j’ai beaucoup aimé le coup de la photo de la tenue, il faut juste ne pas se tromper de photo à envoyer ^^
Merci Mélanie! Oui en effet, ce serait fâcheux!! 🙂
trop drôle ton article! mais tu sais tout n’est pas spécifique aux US, ici aussi on peut avoir zéro ambition sans aucun problème, je le vois tous les jours dans mon travail 😉
Je comprends que tu n’aies pas forcément envie de faire carrière (!) mais enfin ici le manque d’ambition se traduit aussi (et surtout) par une espèce de nonchalance (super chiante) qui fait que les gens traînent la patte et passent plus de temps à discuter qu’à faire quoi que ce soit! … 😉
Je viens de découvrir ton blog et il est tout simplement génial! Je suis une toute nouvelle expatriée française à NY, j’ai décidé de suivre mon mari et pour l’instant nous sommes à Jersey City. Ton article sur la recherche d’appartement est totalement vrai car nous avons vécu pas mal de péripéties également. Nous venons tout juste de trouver notre appartement dans Manhattan.
Il ne me reste plus qu’à me trouver un job et tes articles vont m’être très utile 😉!
Merci de ton commentaire Gwen, et bienvenue à New York 😉
Je viens de découvrir ton blog qui est génial et pourtant j’en ai fait des recherches depuis l’annonce de notre prochain départ !
Nous sommes en préparation pour un départ dans 1 mois pour les US (Jersey City) …la famille suit mon mari (une sacrée aventure à 4:))
je suis conquise par tes écrits qui me rassure…, merci pour ce partage 🙂
j’aurai plein de questions à te poser si tu as de la dispo